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Mais la mesure qui contribua le plus à cicatriser les plaies de la République fut le projet d’amnistie du tribun Plotius en faveur de tous ceux qui avaient pris part à la guerre civile. Dans ce nombre étaient compris les débris de l’armée de Lepidus restés en Espagne depuis la défaite de Sertorius, et parmi lesquels se trouvait L. Cornelius Cinna, beau-frère de César. Ce dernier, dans des discours qui ne nous sont pas parvenus, mais cités par différents auteurs, n’épargna rien pour assurer devant le peuple le succès de la proposition[1]. « Il insista sur la convenance de décider promptement cette mesure de réconciliation, et fit observer que le moment de la prendre ne pouvait être plus opportun[2]. » Elle fut adoptée sans difficulté. Tout semblait favoriser le retour aux institutions anciennes. La censure, interrompue pendant dix-sept ans, fut rétablie, et L. Gellius et C. Lentulus, nommés censeurs, exercèrent leur charge avec tant de sévérité, qu’ils rayèrent du sénat soixante-quatre de ses membres, probablement créatures de Sylla. Au nombre des exclus figurèrent Caius Antonius, précédemment accusé par César, et Publius Lentulus Sura, consul de l’année 683.

Tous ces changements avaient été proposés ou acceptés par Pompée, bien plus pour plaire à la multitude que pour obéir à des convictions arrêtées. Il avait par là perdu ses véritables appuis, résidant dans les hautes classes, sans acquérir dans le parti opposé la première place, déjà occupée par César. Mais Pompée, aveuglé sur sa propre valeur, s’imaginait alors que nul ne pouvait l’emporter sur lui en influence ; toujours favorisé par les événements, il avait été

  1. « Equidem mihi videor pro nostra necessitate, non labore, non opera, non industria defuisse. » (Certes, je crois avoir déployé tout le zèle, tous les efforts, toute l’habileté que réclamait notre parenté.) César cité par Aulu-Gelle, XIII, iii. — Nonius Marcellus, De la signification diverse des mots, au mot Necessitas.
  2. Salluste, Fragments, I, 68.