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sacre des habitants et l’extermination de ses ennemis ; rien ne lui coûta non plus pour s’y maintenir. Il inaugura sa rentrée au sénat par l’égorgement, près du temple de Bellone, de trois mille Samnites qui s’étaient rendus[1]. Un nombre considérable d’habitants de l’Italie furent privés du droit de cité qu’on leur avait accordé après la guerre des alliés[2] ; il inventa une nouvelle peine, la proscription[3], et, dans Rome seule, il bannit quatre mille sept cents citoyens, parmi lesquels quatre-vingt-dix sénateurs, quinze consulaires, deux mille sept cents chevaliers[4]. Sa fureur s’appesantit principalement sur les Samnites, dont il redoutait l’esprit d’indépendance, et il anéantit presque entièrement cette nation[5]. Quoique son triomphe ait été une réaction contre le parti populaire, il traita en prisonniers de guerre les enfants des familles les plus nobles et les plus considérées, et, par une innovation monstrueuse, les femmes mêmes subirent un sort pareil[6]. Des listes de proscription, affichées au Forum avec les noms des suspects, jetaient la terreur dans les familles ; rire ou pleurer en y arrêtant les regards était un crime[7]. M. Pletorius fut égorgé pour s’être évanoui à la vue du supplice infligé au préteur

  1. Dion Cassius (XXXIV, cxxxvi, § 1) porte ce chiffre à 8 000 ; Appien, à 3 000. Valère Maxime parle de trois légions (IX, ii, i).
  2. « Un grand nombre d’alliés et de Latins furent privés par un seul homme du droit de cité qu’on leur avait donné pour leurs services nombreux et honorables. » (Discours de Lepidus, Salluste, Fragm. I, 5.) — « Nous avons vu le peuple romain, sur la proposition du dictateur Sylla, ôter, dans les comices des centuries, le droit de cité à plusieurs villes municipales ; nous l’avons vu les priver aussi des terres qu’elles possédaient… Quant au droit de cité, l’interdiction ne dura pas même aussi longtemps que le despotisme militaire du dictateur. » (Cicéron, Discours pour sa maison, xxx.)
  3. Appien, Guerres civiles, I, xi, 95. — Velleius Paterculus, II, xxviii.
  4. Appien, Guerres civiles, I, xi, 95.
  5. Strabon, V, iv, 207.
  6. Dion-Cassius, XXXIV, cxxxvii, § 1.
  7. Dion-Cassius, XXXIV, cxxxvii.