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des plans de campagne variant annuellement avec les généraux. Plusieurs consuls, cependant, ne manquèrent ni d’habileté ni de persévérance, et le sénat, toujours reconnaissant, récompensa dignement leurs services. Quelques-uns obtinrent les honneurs du triomphe, entre autres, Duilius, qui gagna la première bataille navale, et Lutatius, dont la victoire décida de la paix. À Carthage, au contraire, les meilleurs généraux étaient victimes de l’envie et de l’ingratitude. Xanthippe, vainqueur de Regulus, fut promptement éloigné par la jalousie de la noblesse, qu’il avait sauvée[1], et Amilcar, calomnié par une faction rivale, ne reçut pas de son gouvernement l’appui nécessaire à l’exécution de ses grands desseins.

Pendant cette lutte de vingt-trois ans, la guerre manqua souvent d’une direction habile et suivie, mais les légions ne perdirent rien de leur ancienne valeur, et on les vit même un jour en venir aux mains avec les auxiliaires, qui leur disputaient le poste le plus périlleux ; on peut citer aussi l’intrépidité du tribun Calpurnius Flamma, qui sauva les légions enfermées par Amilcar dans un défilé. Il couvrit la retraite avec trois cents hommes, et, retrouvé vivant sous un monceau de cadavres, reçut du consul une couronne de feuillage, modeste récompense, mais suffisante alors pour inspirer l’héroïsme. Tous les sentiments nobles étaient exaltés au point de rendre justice à un ennemi. Le consul L. Cornelius fit de magnifiques obsèques à Hannon, général carthaginois, mort vaillamment en combattant contre lui[2].

Pendant la première guerre punique les Carthaginois menacèrent souvent les côtes de l’Italie, sans jamais tenter un débarquement sérieux. Ils ne purent trouver d’alliés parmi les peuples récemment soumis : ni les Samnites, ni

  1. Polybe, I, xxxvi.
  2. Valère Maxime, V, i, 2.