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butaires, telles que Caunos et Stratonicée, qui leur payaient 120 talents (700 000 francs). La navigation du Bosphore, dont ils s’efforçaient de maintenir le passage libre, ne tarda pas à leur appartenir presque exclusivement[1]. Tout le commerce maritime depuis le Nil jusqu’au Palus-Méotide se trouvait ainsi dans leurs mains. Chargés d’esclaves, de bétail, de miel, de cire et de viandes salées[2], leurs navires allaient chercher sur le littoral du Bosphore Cimmérien (mer d’Azof) des blés alors très-renommés[3], et portaient sur la côte septentrionale de l’Asie Mineure les vins et les huiles. Au moyen de ses flottes, et quoique n’ayant qu’une armée de terre composée d’étrangers[4], Rhodes fit plusieurs fois la guerre avec succès. Elle lutta contre Athènes, notamment de 397 à 399 ; elle résista victorieusement, en 450, à Demetrius Poliorcète, et dut son salut au respect de ce prince pour un magnifique tableau d’Ialysos, œuvre de Protogène[5]. Pendant les campagnes des Romains en Macédoine et en Asie, elle leur fournit des flottes considérables[6]. Sa force maritime se maintint jusqu’à la guerre civile qui suivit la mort de César ; mais à cette époque elle fut anéantie.

  1. Nous voyons en effet avec quel soin les Rhodiens se ménageaient des alliés du côté du Pont-Euxin. (Polybe, XXVII, vi.)
  2. Polybe, IV, xxxviii.
  3. Strabon, VII, iv, 259.
  4. Tite-Live, XXXIII, xviii.
  5. Pendant le siège de Rhodes, Demetrius avait formé le projet de livrer aux flammes des édifices publics dont l’un renfermait le fameux tableau d’Ialysos, peint par Protogène. Les Rhodiens envoyèrent une députation à Demetrius pour lui demander d’épargner un tel chef-d’œuvre. Après cette entrevue, Demetrius leva le siège, épargnant ainsi à la fois la ville et le tableau. (Aulu-Gelle, XV, xxxi.)
  6. En 555, vingt navires ; en 556, vingt bâtiments pontés ; en 563, vingt-cinq bâtiments pontés et trente-six vaisseaux. Cette dernière flotte de trente-six vaisseaux fut détruite, et cependant les Rhodiens purent remettre à la mer, la même année, vingt vaisseaux. En 584, ils avaient quarante vaisseaux. (Tite-Live, XXXI, xlvi ; XXXII, xvi ; XXXVI, xlv ; XXXVII, ix, xi, xii ; XLII, xlv.)