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Il ne reste plus à citer dans l’intérieur de la ville que des vestiges sans grand intérêt, quelques enceintes de pagodes, trois tours sur la route qui conduit du palais à la porte nord-est, une tour, accompagnée de deux autres plus petites et de deux sra, sur la route de Baion à la porte ouest, une autre tour à peu de distance de celle-là. À chaque angle de l’enceinte est une tour entourée d’un mur.

En dehors de la ville, du côté ouest, la tradition n’indique aucun monument ; au nord, les habitants en citent un, la résidence de Preacan, qui est à peu de distance de l’angle nord-est ; l’accès en est facile, dit-on, par le côté est ; arrivée par la face ouest, nous n’avons pu trouver aucun sentier pour y pénétrer. Sur cette dernière face, est une belle porte sommée de trois tours et précédée d’un pont orné de géants semblables à ceux de la porte ouest de la ville, mais plus petits.

À l’est de la ville, sont les édifices de Takeo, de TaProhm et d’Ekdey.

Takeo[1]ou Ponteay Keo (Ponteay ou Bonteay signifie forteresse, résidence) est un puissant édifice à cinq terrasses rectangulaires. La terrasse inférieure est revêtue en pierre de Bien-hoa et mesure environ 90 mètres sur le côté de sa base. Les autres terrasses sont revêtues en grès. Une galerie couverte règne tout autour du second étage. Le plateau supérieur, qui est à 18 mètres au-dessus du sol et qui a 40 mètres environ de côté, supporte une tour centrale d’une trentaine de mètres de hauteur, et quatre autres tours plus petites. Ces tours sont d’une architecture sévère, très-sobre d’ornements. Le monument tout entier porte l’empreinte de la force. Les moulures des terrasses ont plus de relief que celles de Bakheng. Peut-être Takeo n’a-t-il pas été entièrement terminé. Le nom de cet édifice indique qu’il a dû contenir une de ces fameuses statues du Bouddha en pierre précieuse, qui ont donné lieu à tant de légendes en Indo-Chine, et dont nous aurons à parler à propos de l’histoire du Cambodge.

Ta Prohm est une vaste résidence à galeries croisées et à grande enceinte extérieure. Celle-ci mesure environ 400 mètres dans les deux sens et n’est que très-légèrement rectangulaire. À 80 mètres en dedans, est une seconde enceinte, et enfin, à une distance un peu moindre, apparaît la première galerie du monument, galerie qui, comme celle d’Angcor Wat, est formée extérieurement de deux rangées de colonnes et intérieurement d’un mur plein. Des portes à trois tours paraissent avoir existé sur les quatre côtés. Sur les faces nord et sud, huit colonnades transversales, reliées entre elles deux à deux, conduisent de cette première galerie à la seconde. La troisième galerie et la tour centrale sont ruinées. Le monument est tellement dévasté par la main des hommes et du temps, qu’une reconstitution exacte demanderait une fort longue étude sur les lieux. Il semble d’ailleurs qu’il y ait eu des reconstructions partielles faites à diverses époques. On trouve les ruines de petites tours de 8 à 10 mètres de haut, à beaucoup de croisements de colonnades. Mouhot dit qu’au moment de sa visite des lieux, des mandarins s’occupaient de faire transporter l’une de ces tours à Bankok. On voit à leur base, dans des niches ogivales, des sculptures de femmes dont quelques-unes sont fort remarquables. À l’intérieur de l’édifice, est une statue qui serait celle du roi Ta Prohm. Elle peut être prise comme spécimen

  1. Voy. Atlas, lre partie, planche XXI, le plan et l’élévation de ce monument.