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DÉPART DE YUN-NAN.

terrain, des collines surgirent à notre gauche, et formèrent avec la chaîne de droite, de laquelle nous nous étions beaucoup rapprochés, un défilé étroit, réputé dangereux. Les villages se firent plus rares ; la plupart de ceux que nous traversions n’étaient que des monceaux de ruines. Les Mahométans avaient affreusement ravagé cette contrée où ils comptent de nombreux coreligionnaires ; ceux-ci, malgré leur départ, continuent à tenir en échec la population chinoise qui se montre tremblante et soumise devant eux. Les croupes rougeâtres et incultes qui s’élevaient des deux côtés de la route semblaient frappées d’une stérilité irrémédiable. Le 12, nous descendîmes le lit d’un ravin qui ne tarda pas à se transformer en ruisseau. Une vallée profonde s’ouvrit devant nous. C’était celle du Li-tang ho, rivière qui se jette dans le fleuve Bleu non loin de Tong-tchouen ; nous en suivîmes les bords, où se montrait subitement une belle et vigoureuse végétation, jusqu’au village de Kon-tchang, situé au confluent d’un affluent de la rive droite.


ENTRÉE DE LA PLAINE DE TONG-TCHOUEN.

Nous nous arrêtâmes à Kon-tchang une journée entière. M. de Lagrée était atteint d’une fièvre continue et d’un point de côté et avait besoin de repos. Cette localité est pauvre et sans ressources. Comme son nom le fait pressentir (tchang signifie mine en Chinois), y a dans le voisinage des gisements de cuivre. La petite rivière qui y passe creuse son lit sinueux et encombré de cailloux dans les flancs du plateau qui limite à l’est la vallée du Li-tang ho. Nous le remontâmes pendant quelque temps, puis nous nous élevâmes de nouveau sur le plateau dont l’altitude moyenne est de 2,600 mètres. La population de cette zone, assez clair-semée, perd sa physionomie chinoise et accuse une proportion considérable de sang étranger. Les maisons sont construites en boue. L’avoine et la pomme de terre poussent seules sur ces cimes que balaye sans cesse un vent glacial. C’est à peine si quelques arbustes rabougris réussissent à s’abriter dans les plis du terrain couvert çà et