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Bankok, le 13 juin 1866.

Son Excellence le Chao Phya Bhudhara Bhay, ministre des provinces du Nord et des provinces adjacentes du fleuve Mékong, a l’honneur de faire savoir aux mandarins gouverneurs des provinces du Laos que, d’après une lettre de Son Excellence l’amiral de la Grandière, gouverneur de la Cochinchine française, adressée à Son Excellence le Chao Phya Sri Surivong Ti Samua Phya Kalahome, premier ministre, il a plu à Sa Majesté l’Empereur des Français, souverain d’une nation amie, d’envoyer une société de mandarins français pour explorer le pays, dresser des cartes géographiques et visiter les habitants du Laos.

Pour se conformer aux intentions de son souverain, l’amiral de la Grandière a envoyé Monsieur le commandant de Lagrée et les mandarins de sa suite pour cette mission. Son Excellence le Chao Phya Kalahome, premier ministre, en ayant référé à Sa Majesté le roi de Siam, il plut à Sa Majesté de répondre que, puisque la France était possesseur d’une partie de la Cochinchine, s’il plaisait à l’amiral de la Grandière d’envoyer Monsieur le commandant de Lagrée pour inspecter la frontière, dresser des cartes, explorer les richesses du pays, tant pour le règne végétal que pour le règne animal, il convenait qu’il pût le faire pacifiquement et sans encombre. Du reste, comme la mission de Monsieur le commandant de Lagrée est une mission scientifique, et que le commandant s’engage à respecter les lois et la coutume des pays par où il passera, Sa Majesté le roi de Siam ordonne aux différents mandarins gouverneurs des provinces de recevoir Monsieur le commandant de Lagrée avec toutes sortes d’égards ; de lui préparer des logements, s’il a besoin de se reposer ; de recevoir, de soigner et de ne laisser manquer de rien les malades qui ne pourraient suivre l’expédition ; d’aider à procurer de la meilleure manière possible des vivres aux mandarins français et à leur suite, s’ils venaient à en manquer ; de louer au prix du pays les rameurs, les barques, les éléphants, les chars, les buffles dont l’expédition pourrait avoir besoin ; de lui procurer des guides pour les endroits qu’elle désire voir, et enfin d’empêcher de tout leur pouvoir qu’elle ne soit molestée ou volée en route par les brigands.

Que tous les mandarins gouverneurs des provinces qui verront cette lettre se gardent d’y contrevenir, afin que les mandarins français puissent aller et venir sans encombre.

Chao Phya Bhudhara Bhay,
Ministre des provinces du Nord et des provinces adjacentes du fleuve Mékong.


Le gouverneur de la colonie avait également fait faire des démarches auprès des cours de Hué, de Péking et d’Ava pour en obtenir des passe-ports analogues. Il espérait pouvoir les faire parvenir à la mission avant le 1er décembre 1866, en même temps que quelques instruments que n’avait pu fournir l’observatoire de Saïgon et que l’on avait dû demander en France.

Le 5 juin 1866, à midi et demi, la petite expédition quitta la rade de Saïgon sur les canonnières 32 et 27. Le premier de ces deux bâtiments avait pour capitaine M. Pottier, lieutenant de vaisseau, qui allait remplacer M. de Lagrée dans la direction des affaires du protectorat ; le second, commandé par M. Espagnat, enseigne de vaisseau, devait rester à la disposition de la Commission pendant tout son séjour au Cambodge.

Un photographe de Saïgon, M. Gsell, était adjoint à la Commission pendant le même temps.