Page:Louis Delaporte - Voyage d'exploration en Indo-Chine, tome 1.djvu/263

Cette page a été validée par deux contributeurs.
228
VALLÉE DU FLEUVE JUSQU’À PAK MOUN.

12 degrés. Le 26 décembre, nous franchîmes l’étranglement du fleuve formé par Phou Molong ; nous consacrâmes la journée du lendemain à l’ascension de Phou Salao[1]. Au pied de cette petite montagne, du côté du nord, s’étend la plaine de Muong Cao ou de « l’Ancien Muong, » lieu où ont résidé tout d’abord les rois de Bassac. Quelques constructions en brique, à demi ruinées, témoignent de leur passage.

Au delà, quelques îles réapparaissent dans le fleuve ; l’une d’elles, Don Co, est reliée à la rive droite du fleuve par un banc de roches qui était à fleur d’eau au moment de notre passage ; la direction de ce barrage est le N. 35 E., et le chenal doit être cherché sur la rive gauche. De nouvelles montagnes surgissent à l’horizon. Le 29 décembre, nous nous trouvions au pied de contre-forts chevauchant les uns sur les autres sur la rive gauche. Sur l’autre rive, une montagne isolée, Phou Fadang, contient les eaux du fleuve qui, pour la première fois, quitte complètement la direction du nord pour se diriger à l’ouest ; il s’effile, comme sous les rouleaux d’un laminoir, entre deux murailles de roches à peine distantes de 200 mètres. Sa profondeur est énorme en ce point, et je ne trouvai pas fond à 70 mètres. Au sortir de cet étroit passage, on se trouve devant l’embouchure du Se Moun, qui vient du sud-ouest, alors que le grand fleuve se redresse lentement vers le nord. Le village de Pak Moun ou « embouchure du Moun, » est bâti au confluent[2].


EMBOUCHURE DU SE MOUN.

De nombreux rapides s’échelonnent depuis le confluent du Se Moun jusqu’aux deux tiers environ de la distance d’Oubôn, et nos bateliers durent se livrer à une rude gymnastique pour faire franchir à nos pirogues tous ces obstacles successifs. Le premier et l’un des plus considérables est à deux kilomètres à peine de l’embouchure. Tout auprès, sur la rive gauche, est la borne qui sert de limite aux royaumes d’Oubôn et de Bassac. Le dernier jour de l’année 1866 fut employé à franchir ce rapide. Il fallut décharger entièrement nos barques et les faire passer à force de bras par-dessus les rochers. Tout le monde s’y employa avec entrain, et les Laotiens ne laissaient pas que d’être assez étonnés du concours actif et entendu qu’ils recevaient de l’escorte et des officiers mêmes de la Commission française. Nous fîmes un peu moins d’un kilomètre dans toute l’après-midi

  1. Voy. le panorama du fleuve pris du sommet de cette montagne, Atlas, 2e partie, pl. XIV.
  2. Consultez, pour la suite du récit, la carte itinéraire n°3, Atlas, 1re  partie, pl. VI.