roches qui parsèment cette partie du fleuve à l’époque des basses eaux, on n’apercevait sur l’immense fleuve que quelques lointains et rares bouquets d’arbres qui indiquaient la place des rochers submergés ; à plus d’un mille de distance apparaissait la rive droite. Le long de la berge que nous suivions, un large espace semblait libre de tout obstacle et offrait un passage facile à un navire à vapeur doué d’une force suffisante pour refouler le courant. En définitive, ces rapides tant redoutés semblaient s’évanouir avec la crue des eaux, et la navigabilité du fleuve, qui était au début du voyage le point le plus important à constater, pouvait jusque-là s’affirmer sans crainte. À 5 heures du soir, nous étions arrivés à Sombor[1].
C’était le dernier point de quelque importance appartenant au Cambodge que nous devions rencontrer. Le gouverneur de la province de Samboc-Sombor y réside : il accueil-
lit le commandant de Lagrée avec tout le respect dû à son rang. Confortablement installés
dans l’une des nombreuses cases qui composent la demeure de ce fonctionnaire, et bien à
l’abri sous nos moustiquaires, nous passâmes une nuit meilleure que la précédente. L’excellent
mandarin reçut de M. de Lagrée, en retour de quelques cadeaux de volaille et de
fruits, un revolver choisi dans notre stock d’objets d’échange. À ce prix, il eût volontiers
prolongé une hospitalité dont ses contribuables faisaient tous les frais. Mais le temps pressait
et nous ne pûmes donner à ses instances que la matinée du jour suivant.
La province de Sombor[2] est riche surtout en produits forestiers, tels que la cire, la gomme laque, les peaux de cerfs. Des routes conduisent à l’intérieur du pays, qui est oc-