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Lorsque l’esclavage ne sévit pas sous son aspect ancien, il revêt une forme nouvelle. La corvée, le contrat à long bail, le travail obligatoire et peu ou point rétribué, reconstituent une classe de serfs pressurés et abrutis, qui n’ont même plus la sécurité de leurs aînés, parce qu’ils ne représentent pas ostensiblement une valeur marchande. Le nègre est libre en principe, aussi « libre » que le citoyen français ou que l’électeur anglais ; en fait, il est assujetti, obligé à la résidence, condamné à fournir tant d’heures de labeur, tant de charges de caoutchouc ou d’ivoire. À la vérité, l’on retrouve dans les colonies d’Afrique, et parfois dans les colonies d’Asie, les pratiques que les Portugais, les Hollandais et les Espagnols mirent en honneur dans l’Insulinde.

Pour le droit moderne, entendons le droit capitaliste dans toute sa rigueur, le prolétaire a la faculté théorique de louer ou de ne pas louer ses bras : l’on sait au surplus quel abîme sépare la théorie de la réalité. Cette faculté théorique elle-même est déniée à l’indigène du continent noir ou des îles de la Polynésie. Il est devenu, en même temps que la terre, la propriété des nouveaux dominateurs.

À Madagascar, les routes, les divers travaux publics ont été exécutés par la corvée ; les entreprises particulières sont desservies par des Hovas ou des Sakalaves, auxquels un arrêté du 27 décembre 1896 a enjoint de passer un contrat de travail. Aux Comores, les Compagnies privées ont profité de la connivence des fonction-