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nombre, nul ne s’occupe. Il s’agit seulement d’exporter et d’importer, pour développer un commerce qui a fait l’opulence de la mère-patrie, mais qui appauvrit, chaque année un peu plus, la péninsule. La constitution de l’industrie autour de Calcutta et de Bombay a semblé une rébellion et un blasphème. Le rôle de l’Inde, pour les économistes officiels de Londres, est d’expédier des céréales et du coton, et d’acheter des objets manufacturés. On s’inquiète peu que des millions de sujets meurent de la famine, comme il arrive dans les années mêmes où les négociants en blé adressent d’énormes convois à l’Europe. Le paysan ou ryot mange aujourd’hui trois fois moins qu’il y a un siècle. Il était plus heureux sous la domination des Mogols, qui vivaient dans le pays, et appelaient des Indous aux fonctions. L’Anglais regarde la vice-royauté comme une ferme qui doit rendre le plus possible, et dont les richesses doivent être, autant que les circonstances le permettent, transférées en Europe. Hyndman calcule que de 1870 à 1904, 15 milliards ont été arrachés aux populations qui s’échelonnent de l’Himalaya à Ceylan. Il compare la conduite du Royaume-Uni, dans son domaine asiatique, à celle des Espagnols au Pérou.

Encore les Indous n’ont-ils pas été détruits, décimés par la force, abrutis par l’eau de feu. Ailleurs des centaines de milliers d’indigènes ont été ainsi exterminés. Les Australiens primitifs, qui avaient bien accueilli les premiers