Page:Louis - Le Colonialisme, 1905.djvu/65

Cette page a été validée par deux contributeurs.

de toutes choses. Les natifs prirent la culture en haine, se désintéressèrent de toute initiative, et ne songèrent plus qu’à acquitter les impôts. D’affreuses famines surgirent qui, parfois, comme en 1880, fauchèrent plus de 500,000 hommes d’un seul coup.

Aux Moluques, où fonctionna le même système, la barbarie hollandaise se déploya plus librement encore. Non contents d’astreindre au plus dur travail, et sans rémunération, les gens de l’archipel, les dominateurs transportèrent de force, dans les terres les plus fertiles, des indigènes qu’on arrachait à leurs cabanes. De la sorte Amboine reçut des contingents considérables. Mais la révolte ne tarda pas à éclater. Les massacres alors furent conduits avec une telle rage, que des îles, qui étaient très peuplées au xviiie siècle, n’ont plus aujourd’hui que 2 ou 3 habitants au kilomètre carré. À côté d’elles, d’autres îles comptent 124 et 167 habitants au kilomètre, sans qu’on puisse expliquer la différence autrement que par le carnage. Les Espagnols, aux Philippines, se livrèrent à d’égales atrocités. Ne travaillant pas eux-mêmes, ils brutalisèrent les aborigènes pour s’enrichir de leur labeur. De 1780 à 1882 fut maintenu l’esclavage d’État, chaque village étant contraint à se livrer à une culture déterminée, et à en céder la récolte aux administrateurs, bien au-dessous de sa valeur marchande. Il arriva que la population, forcée de produire pour l’Europe, pour les besoins de luxe d’une autre race, ne produisait plus pour sa propre consommation. Le