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plus, le Japon et l’Amérique, l’expansion territoriale des puissances avait pu s’opérer lentement et timidement. Elle a semblé une nécessité, le jour où la surproduction a partout prévalu, avec le nouvel outillage. Elle a pris, dans les dernières années, tous les traits de la fatalité.

La classe possédante a dû coloniser, sous peine de mort. Au risque de périr, avant l’heure, sous l’entassement de ses produits manufacturés, elle a été entraînée à chercher, sabre au poing, des clients. Elle ne s’est préoccupée ni de la religion chrétienne, ni de l’humanité, ni de l’évacuation des régions surpeuplées, ni d’aucune idée morale, ni d’aucune fin politique, mais uniquement de ses intérêts les plus immédiats. Cette histoire est celle de l’aristocratie dirigeante du monde envisagée dans son ensemble, car elle s’applique aux métallurgistes de Pittsburg, du Creusot et de Seraing, comme aux tisseurs des Flandres et du Lancashire, comme aux verriers du Nord et d’Allemagne. Le colonialisme est la dernière carte du capitalisme : or, — et la conséquence est décisive pour la bourgeoisie, — le colonialisme aboutit finalement à répandre le capitalisme sur toute la surface des terres, c’est à dire à surexciter la concurrence, et la surproduction, c’est-à-dire aussi à supprimer les garanties qu’il semblait contenir, et à porter à l’extrême le péril qu’il devait écarter ou atténuer.