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1880. L’effondrement actuel de la Russie fait justice de cette thèse, qui n’a jamais, au surplus, été qu’accessoire dans l’esprit de ceux qui la soutenaient. Chauvinisme, mégalomanie idéaliste, phraséologie pauvre, et répétitions conscientes et voulues : voilà tout le fond de la propagande coloniale dans les pays latins et dans les pays anglo-saxons —, en admettant toutefois les fameuses distinctions d’origine ethnique.

Mais à quoi bon s’étendre ? Il suffit de cataloguer les arguments forgés pour les besoins de la cause. M. Leroy-Beaulieu fait appel à l’âme même des collectivités humaines, qui doivent sans relâche élargir leur horizon : « La conscience nationale, dit-il, sait que seule la colonisation peut maintenir ouverte cette vaste carrière d’activité et d’expansion, ce champ nécessaire de l’idéal, dont ne peut se passer complètement un peuple qui n’est pas caduc. »

Les devoirs des gens policés, vis-à-vis de ceux qui ne le sont pas, ou qui le sont moins, ont été, des centaines de fois, invoqués. Les groupements politiques de l’Europe occidentale ou centrale, qui jouissent d’une constitution, de certaines libertés, d’un semblant d’ordre public, qui ont réussi à assurer la sécurité des routes et à purger les forêts des bêtes fauves, ont des obligations strictes et inéluctables à l’égard des tribus d’Océanie ou d’Afrique. Peuvent-ils permettre que des roitelets fauchent des milliers de vies humaines, que les