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les expéditions de Chine ou d’ailleurs, n’ont garde d’avouer les causes exactes de leurs entreprises. Ou s’ils laissent percer les motifs vrais, ils s’efforcent tout de suite de les masquer par des déclamations creuses et des raisonnements de haute métaphysique sociale. Ces sophismes qui se sont étalés impunément, à la tribune ou dans les journaux, depuis un quart de siècle, il importe de ne les point laisser subsister.

Le peuple, trop souvent sentimental et naïf, détourné de toute perception nette des réalités par l’éducation de l’école primaire, offre à la duperie des mots une masse malléable à merci. Les ministres dirigeants et les économistes, engagés dans le colonialisme, ont accumulé les formules dérisoires, pour le convaincre.

On a accrédité cette idée que plus vaste est le domaine exotique d’une nation, et plus consistant est son prestige. Ferry demandait jadis aux Français s’ils voulaient que leur pays devînt « une Suisse », et Seeley, le théoricien de l’impérialisme britannique, écrivait : « Les États qui garderont une faible étendue en face de ces colossales agglomérations de la Russie, de l’Amérique, tomberont au second rang. » À ce compte-là, il suffirait d’annexer quelque désert, quelque terre inhospitalière, pour passer ou rester au premier plan des grandes puissances, et la France de 1900, maîtresse de l’Indo-Chine, de Madagascar et du Tchad, l’emporterait, en vigueur relative, sur la France de