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il gardait une grande gratitude, au roi de lui avoir permis d’épouser la fille du duc de Boulimie.

Cependant, il était bien d’avis que les usurpateurs devaient céder la place aux légitimes héritiers de la couronne. Et c’est pourquoi il secondait les desseins de la princesse sa femme. Celle-ci, d’ailleurs, ne pensait plus qu’aux moyens d’exécuter son audacieux programme, et elle attendit l’occasion de pénétrer, comme elle en avait l’intention, dans la chambre de la reine.

Cette occasion ne vint qu’au bout de quelques jours, un soir qu’il y avait fête au Palais et grand bal de cour. Séraphine sut habilement se retirer, sous prétexte d’un malaise subit, avant les souverains. Elle gagna rapidement les appartements royaux, et, toutes les dames de la cour étant auprès de la reine, put facilement se glisser dans la chambre de celle-ci.

— Me voici dans la place ! dit-elle. Il s’agit maintenant de bien me cacher.

Elle ne trouva pas meilleure cachette que le dessous du lit et elle s’y glissa sans souci de chiffonner sa robe de cour. Elle n’y était pas fort à son aise, mais cela lui importait peu ; elle pensait :

— Se morfondre quelque temps sous un lit est léger inconvénient, lorsqu’il s’agit de gagner une couronne.

Et elle ajoutait, se voyant déjà reine de Sigourie :

— Bientôt ce lit sera le mien, et au lieu de me coucher dessous, je me coucherai dedans, tandis que le traître Hector n’aura qu’une couche de moine. Cela le changera de ces draps de linge fin dans lesquels il m’a odieusement trompée tandis que je subissais pour lui mon martyre au couvent des Puritaines.

C’était là grande exagération car nous n’ignorons pas que la belle Séraphine n’avait enduré aucun martyr durant son séjour parmi les nonnes sur lesquelles veillait l’amie du colonel des hallebardiers de la garde. Mais il fallait bien qu’elle se posât en victime, même à ses propres yeux, pour justifier son attitude présente.

Elle eut tout le temps de penser à sa vengeance, car ce fut au bout de deux heures seulement que la reine Yolande regagna ses appartements.

Séraphine assista alors à la transformation de la jeune souveraine, qui se dépouilla de sa robe et de ses vêtements féminins pour revêtir comme chaque soir ses habits d’homme. Malgré qu’elle s’y attendît, la fille du duc de Boulimie n’assista pas sans étonnement à ce spectacle, et lorsqu’elle revit apparaître à ses yeux le jeune Hector, elle ne put s’empêcher de murmurer :

— Ah ! le misérable ! Je ne sais ce qui me retient de lui sauter à la gorge !