Page:Louis-d-elmont-l-inceste royal-1925.djvu/48

Cette page n’a pas encore été corrigée
— 46 —

— Messire Arnaud, j’admire votre juvénile ardeur. Et je ne doute pas que vous eussiez apporté pour accomplir cet exploit autant d’audace que vous mettez de feu dans votre discours… Aussi vous avouerai-je que je me suis fait déjà semblable raisonnement, et que je dois bien reconnaître que je doute depuis quelque temps qu’Hector m’ait aimée avec une véritable passion…

En entendant ces mots, Arnaud ne put plus se contenir. Il se jeta à genoux devant la princesse et lui dit :

— Ô Séraphine, je n’ai pu vous voir sans vous aimer ! Ce que n’a pas tenté le comte de Vergenler, moi, je le ferai pour l’amour de vous… Quand bien même vous devriez après me repousser et que je devrais en perdre la vie ! Dites-moi que vous consentez, et, cette nuit même, nous fuirons ensemble !…

Un éclair de joie brilla dans les yeux de la princesse. Libre ! Elle pouvait être libre !… Déjà elle s’était laissée aller à penser qu’elle connaîtrait à nouveau l’amour, et il ne lui était pas désagréable d’évoquer l’image du jeune officier des hallebardiers comme son futur amant… Et voilà qu’il venait au-devant de ses secrets désirs, se déclarait prêt à la plus folle des tentatives, disposé à tous les sacrifices, résolu à braver la colère royale pour la délivrer.

Elle ferma ses beaux yeux et dit :

— Arnaud, vous êtes brave et digne de mon amour ! Si vous me libérez, sitōt hors de ce couvent, je jure de vous appartenir !

— Ô Séraphine ! Vous me donnez la force de braver tous les chevaliers du monde. Pour un tel bonheur, il n’est rien que je ne tente, et le roi lui-même se mettrait sur mon chemin que je lui passerais mon épée au travers du corps.

En gage de cette félicité sans pareille que vous me faites entrevoir, me permettrez-vous pas de prendre sur vos jolies lèvres un premier baiser ?

La princesse accorda naturellement au bel officier la faveur qu’il sollicitait, et même ce ne fut pas un, mais plusieurs baisers que prit Arnaud et que Séraphine lui rendit,

— Tenez-vous prête, lui dit-il en la quittant, je viendrai vous prendre ce soir.

Lorsque la nuit tomba, le jeune lieutenant se présenta au couvent, ce qui ne surprit aucunement les tourières qui avaient l’habitude de le voir venir à toute heure. Il gagna la cellule de Séraphine qui l’attendait.

— Je vous ai apporté, dit-il, des vêtements d’homme. Deux chevaux nous attendent à la sortie du couvent.

La princesse se dévêtit, tandis qu’Arnaud se tenait dans un cabinet voisin et elle revint bientôt costumée en jeune gentilhomme. Par-dessus ce costume, elle passa une robe de nonne, puis accompagna l’officier.

Devant la tourière, Arnaud s’effaça :