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plates, avec une grande route plantée d’arbres, chemin qu’aurait pris le Roi pour aller à sa capitale s’il n’avait pas eu cent raisons (et même trois cent soixante-six) de ne pas quitter son palais. Un énorme figuier faisait retomber comme un tapis par-dessus la balustrade ses branches cachées par les feuilles plates et ses fruits poudrés de lilas. Vers la gauche, le parc se massait, avec ses magnolias déjà défleuris, ses eucalyptus frissonnants, ses palmiers trapus du Japon, ses magnifiques sagoutiers lunaires. Une défense d’aloès ourlait le jardin sombre et la plaine s’étendait au delà jusqu’aux étoiles.


— Comme cette nuit ressemble à celle de mes noces ! murmura Diane. Il n’y a pas eu d’autre belle nuit depuis un an. Celle-ci est tout à fait la sœur de la première. N’est-ce pas qu’il y a des nuits étranges où le paysage qui nous regarde a l’air de contenir tout le bonheur que nous voudrions enfermer en nous ?

Pausole ne répondit rien.

— On a frappé, reprit la Reine.

— Ce doit être pour le dîner, dit Pausole. Il fait grand faim.

Et il cria :