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mangea quelques biscuits imbibés de vieux porto.

Une image cependant l’obsédait. Il se disait qu’à l’instant précis où il prenait dans sa chambre ce temps de repos et de réflexion, sa fille accomplissait sans doute l’acte le plus important de sa première adolescence. Il la voyait malgré lui dans une attitude, hélas ! trop facile à imaginer, et toutes les phases de la scène connue se reproduisaient dans sa pensée avec la vraisemblance la plus désagréable.

D’une façon particulière, il était choqué de n’avoir aucun renseignement sur le second des deux personnages qui jouaient un rôle dans l’aventure. On troublait sa vie ; on causait un préjudice capital à sa tranquillité d’esprit, et il ne savait même pas sur qui pester ! Un tel événement n’aurait pas dû se produire sans qu’il y prît au moins une part de conseil. À toute branche d’éducation convient un professeur spécial dont l’aptitude et la compétence ne peuvent guère être appréciées par l’élève lui-même. Pausole ne comprenait pas comment, le jour où sa fille abordait pour la première fois une matière aussi classique, elle avait pris un initiateur de son choix en négligeant toute enquête sur la question de savoir s’il était qualifié pour lui donner des leçons.