Page:Louÿs - Les aventures du roi Pausole, 1901.djvu/362

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Oh ! je t’ai fait de la peine. Tu es devenue blanche…

— Pas le moins du monde. Je ne suis pas de ton avis, voilà tout.

— Mais comme tu es nerveuse ! Pourquoi t’ai-je dit cela ?… Pardon, Mirabelle, je ne le dirai plus… Viens dans un petit coin noir, tout de suite…

— Pourquoi ?

— Pour que je t’embrasse… Si tu me le permets.

Elles prirent une rue obscure et trouvèrent l’abri souhaité : derrière un tombereau de sable qu’on avait laissé là sur cales, les deux jeunes filles, bouche à bouche, se prouvèrent une fidèle tendresse.

— Viens, soupira Mirabelle. Dépêchons-nous, il est tard. Il nous faut une chambre, tu sais.

— Oui, dit Line, j’ai bien sommeil encore. Depuis trois jours j’ai si peu dormi… Je me sens faible, faible, ce soir. Et j’ai mal aux jambes… Comment cela se fait-il ? Nous n’avons guère marché pourtant ?

— C’est parce que tu grandis. Je suis contente de cela. Bon signe, ma chérie.

Line croyait tout ce qu’on lui disait et ne s’inquiéta pas davantage.

Dans une avenue silencieuse, elles s’arrêtèrent