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déplaisante et mal tenue. Il quittait ses vêtements, s’approchait de la pécheresse et articulait d’une voix lamentable : « Voilà ce que c’est que la chair ; comment n’es-tu pas écœurée ? »

— Il en a converti beaucoup ?

— Aucune. La plupart protestaient aussitôt qu’elles n’avaient jamais rien touché de plus tentateur que son corps, et qu’elles aimaient beaucoup les blonds (car il est blond). D’autres lui expliquaient avec un sourire qu’elles n’étaient pas moins aimables envers les beautés de second rang et qu’en échange d’un double prix elles donnaient double tendresse. Celles même qui restaient assez franches pour dire de lui ce qu’elles en pensaient se refusaient à injurier dans le sursaut d’un égal mépris le reste de leurs amants. Celles-là étaient les plus jeunes. Bref, il allait partir très découragé lorsque, ayant appris que la Princesse Aline habitait non loin du harem, il jugea que nulle âme n’était plus en péril que la sienne, et eut la gloire de la sauver.

— Comment s’y est-il pris ?

— C’est un secret. Concurremment, monsieur, il extirpait encore du sein du péché une pauvre danseuse nommée Mirabelle.

— Ah ! nous y voilà donc !