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Mirabelle, impatiente, lança :

— Je te plais ?

— Tu ressembles… veux-tu que je te dise à qui ? À une statue de Narcisse qui est au fond du parc. Mais Narcisse est un monsieur… Tu es la première fille que je regarde ainsi ; je n’ai jamais eu d’amie, tu sais, et je ne vois que de loin les femmes de papa… Je te trouve beaucoup plus jolie qu’elles.

En effet, et à part un simple détail qu’il n’était pas nécessaire d’examiner à tout moment, on pouvait à la rigueur prendre Mirabelle pour un jeune homme. Ce n’était pas sans de bonnes raisons qu’elle jouait les rôles travestis. Telle était l’ambiguïté de ses formes et de son maintien, que, pour mimer les jeunes premiers avec leur vraisemblance physique, elle n’avait besoin de vêtir ni le pourpoint ni le haut-de-chausses. Le tutu suffisait bien.

Elle était grande, mais légère, les flancs droits et le ventre plat. Ses jambes de danseuse alerte prouvaient leur robustesse par une musculature complexe et fine qui se dessinait à la surface lorsqu’elle tendait les jarrets. Le haut du corps était plus grêle.

Dans la peau délicate et pâle de la poitrine, deux