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virent s’éteindre sous une maison lointaine, comme une petite étoile qui se couche.

Il se coucha en effet, et fort rudement, sur une chaise longue. On jeta sur lui les petits souliers à boucle, les bas blancs, la chemise elle-même. Puis la jeune Mirabelle, éclairée par une bougie et nue comme une jeune fille seule, plongea des deux mains dans une malle à robes où il y avait d’ailleurs plus de vestons que de corsages.

Elle y prit une chemise à col plat, de celles qu’on laisse encore porter à certains fils de jolies femmes quand ils feraient beaucoup mieux de n’avoir pas seize ans. Elle se mit un caleçon rayé, un pantalon bleu sombre, une large cravate blanche à coques, un gilet blanc, un veston court et un canotier pour dames.

Ainsi vêtue, les mains dans les poches et le regard derrière l’épaule, elle se jeta devant la glace un coup d’œil qui devint un clin d’œil et vite une petite œillade. Mirabelle avait l’œil gai.

Elle murmura même une phrase à la fois métaphorique et familière dans la langue sibylline dénommée « argot », phrase où elle exprimait que son travesti la réconciliait un instant avec un sexe naïf et laid qui n’était pas tout à fait le sien.

Car dissimuler serait vain. Mirabelle ne se sen-