Page:Louÿs - Les Chansons de Bilitis, 1898.djvu/80

Cette page a été validée par deux contributeurs.

L’orage a duré toute la nuit. Sélénis aux beaux cheveux était venue filer avec moi. Elle est restée de peur de la boue. Nous avons entendu les prières et serrées l’une contre l’autre nous avons empli mon petit lit.

Quand les filles couchent à deux, le sommeil reste à la porte. « Bilitis, dis-moi, dis-moi qui tu aimes. » Elle faisait glisser sa jambe sur la mienne pour me caresser doucement.

Et elle a dit, devant ma bouche : « Je sais, Bilitis, qui tu aimes. Ferme les yeux, je suis Lykas. » Je répondis en la touchant : « Ne vois-je pas bien que tu es fille ? Tu plaisantes mal à propos. »

Mais elle reprit : « En vérité, je suis Lykas, si tu fermes les paupières. Voilà ses bras, voilà ses mains… » Et tendrement, dans le silence, elle enchanta ma rêverie d’une illusion singulière.