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C’est moi maintenant qui le recherche. Chaque nuit, très doucement, je quitte la maison, et je vais par une longue route, jusqu’à sa prairie, le regarder dormir.

Quelquefois je reste longtemps sans parler, heureuse de le voir seulement, et j’approche mes lèvres des siennes, pour ne baiser que son haleine.

Puis tout à coup je m’étends sur lui. Il se réveille dans mes bras, et il ne peut plus se relever car je lutte ! Il renonce, et rit, et m’étreint. Ainsi nous jouons dans la nuit.

… Première aube, ô clarté méchante, toi déjà ! En quel antre toujours nocturne, sur quelle prairie souterraine pourrons-nous si longtemps aimer, que nous perdions ton souvenir…