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plus agrafer mes corsages de l’été dernier. Ouvre celui-ci, tu verras comme je suis belle. »

Si je le lui avais demandé, elle ne l’eût sans doute pas permis, car je commençais à douter que cette nuit d’entretiens s’achevât jamais en nuit d’amour : mais je ne la touchais plus elle : se rapprocha.

Hélas ! les seins que je mis à nu en ouvrant ce corsage gonflé étaient des fruits de Terre promise. Qu’il en soit d’aussi beaux, c’est ce que je ne sais point. Eux-mêmes je ne les vis jamais comparables à leur forme de ce soir-là. Les seins sont des êtres vivants qui ont leur enfance et leur déclin. Je crois fermement que j’ai vu ceux-ci pendant leur éclair de perfection.

Elle, cependant, avait tiré du milieu d’eux un scapulaire de drap neuf et elle le baisait pieusement, en surveillant mon émotion du coin de son œil à demi fermé.

« Alors je vous plais ? »

Je la repris dans mes bras.