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soleil ; et plus nombreuse que la foule active, la foule désœuvrée couvrait la jetée. Des groupes se formaient de place en place, entre lesquels erraient les femmes. On entendait nommer les silhouettes connues. Les jeunes gens regardaient les philosophes, qui contemplaient les courtisanes.

Celles-ci étaient de tout ordre et de toute condition, depuis les plus célèbres, vêtues de soies légères et chaussées de cuir d’or, jusqu’aux plus misérables, qui marchaient les pieds nus. Les pauvres n’étaient pas moins belles que les autres, mais moins heureuses seulement, et l’attention des sages se fixait de préférence sur celles dont la grâce n’était pas altérée par l’artifice des ceintures et l’encombrement des bijoux. Comme on était à la veille des Aphrodisies, ces femmes avaient toute licence de choisir le vêtement qui leur seyait le mieux, et quelques-unes des plus jeunes s’étaient même risquées à n’en point porter du tout. Mais leur nudité ne choquait personne, car elles n’en eussent pas ainsi exposé tous les détails au soleil, si l’un d’eux se fût signalé par le moindre défaut qui prêtât aux railleries des femmes mariées.