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« Tiens-toi tranquille. Tu sais qu’on n’aime pas les Grecs ici ; personne ne viendra t’aider.

— Je ne suis pas Grecque !

— Tu mens, tu as la peau blanche et le nez droit. Laisse-toi faire si tu crains le bâton. »

Chrysis regarda celui qui parlait, et soudain lui sauta au cou.

« Je t’aime, toi, je te suivrai, dit-elle.

— Tu nous suivras tous les deux. Mon ami en aura sa part. Marche avec nous ; tu ne t’ennuieras pas. »


Où la conduisaient-ils ? Elle n’en savait rien ; mais ce second matelot lui plaisait par sa rudesse, par sa tête de brute. Elle le considérait du regard imperturbable qu’ont les jeunes chiennes devant la viande. Elle pliait son corps vers lui, pour le toucher en marchant.

D’un pas rapide, ils parcoururent des quartiers étranges, sans vie, sans lumières. Chrysis ne comprenait pas comment ils trouvaient leur chemin dans ce dédale nocturne d’où elle n’aurait pu sortir seule, tant les ruelles en étaient bizarrement compliquées. Les portes closes, les fenêtres vides, l’ombre immobile l’effrayaient. Au-dessus d’elle, entre les