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aux hanches excessives et qui désignait de la main son ventre frisé en delta. Elles couchaient à ses pieds une branche de myrte, semaient l’autel de feuilles de rose, et brûlaient un petit grain d’encens pour chaque vœu exaucé. Elle était confidente de toutes leurs peines, témoin de tous leurs travaux, cause supposée de tous leurs plaisirs. Et à leur mort on la déposait dans leur petit cercueil fragile, comme gardienne de leur sépulture.

Les plus belles parmi ces filles venaient des royaumes d’Asie. Tous les ans, les vaisseaux qui portaient à Alexandrie les présents des tributaires ou des alliés débarquaient avec les ballots et les outres cent vierges choisies par les prêtres pour le service du jardin sacré. C’étaient des Mysiennes et des Juives, des Phrygiennes et des Crétoises, des filles d’Ecbatane et de Babylone, et des bords du golfe des Perles, et des rives religieuses du Gange. Les unes étaient blanches de peau, avec des visages de médailles et des poitrines inflexibles ; d’autres, brunes comme la terre sous la pluie, portaient des anneaux d’or passés dans les narines et secouaient sur leurs épaules des chevelures courtes et sombres.