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J’ai offert le sujet auquel je pense depuis un an : la femme de Putiphar. Il a peur du ridicule. Le ferai-je quand même ?

Mais oui, je le ferai ! et raison de plus. Et quel sujet : la lutte de la femme contre l’idée. Et le triomphe de l’idée !

Ce sera le titre ! L’Idée.


Vendredi, 26 septembre (27, 1 h. du matin).

l’apogée de mounet-sully[1].

Ce soir, aux Français, j’étais allé voir les premiers débuts de Moreno…

J’en suis sorti envahi, subjugué, stupéfié par Mounet. Jamais, jamais, — non, ni Talma ni personne autre n’a pu atteindre cet homme-là. C’est surhumain, c’est immense, c’est grand comme ce qu’il y a de plus grand au monde.

Zeus, le Zeus d’Homère, la toute-puissance, la majesté, quand je me le représente c’est ainsi. Mounet est olympien ; il a quelque chose de plus que nous, qui nous dépasse et nous atterre.

Déjà, dans ce Ruy Blas qu’il a ce soir transfi-

  1. J’ai vu cent fois Mounet-Sully. Pendant un quart de siècle, où les spectacles m’ont si peu tenté, je suis allé au théâtre plus souvent pour Mounet que pour tous les autres ensemble — et jamais ne l’ai vu plus beau que ce jour-là. — Cela, et la première reprise d’Œdipe, cela passe tout dans mes souvenirs.