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ce journal est-il réellement le résumé de ma vie, y ai-je mis toutes mes pensées, en ai-je fait mon confident, enfin ?

Non.

Non. Au moins pas pendant les six premiers mois.

Depuis, il me semble que cela a changé, que j’écris mieux d’abord, et puis que j’écris ce que je pense ; et qui lirait ces pages depuis le mois de mai verrait clairement que toutes mes pensées se résument en deux mots, en deux aspirations, en deux espérances, en deux ambitions, en deux désirs :


Les femmes
et
Le génie !

Pas la gloire ! Ce n’est pas cela ! Le génie ! Arrière la gloire en gros sous. Si la foule ne m’adule pas, que dix hommes de goût me comprennent, ou, à leur défaut, que moi-même je sois content de moi !

C’est ce que je demande.

Oh ! mon premier baiser !

Oh ! mon premier succès !

Je ne les ai pas.

Et j’en suis bienheureux, car, si je les avais connus, je n’aurais plus à les goûter.

Continuons notre examen : ce que j’ai pensé et dit, ai-je eu raison de le penser et de le dire ?