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cela. — Et pour le reste, il y a deux choses qui me crispent : d’abord il n’y a pas l’ombre d’une description, pas un mot pittoresque[1]. George Sand vous dit comme Shakespeare : Ici une maison, ici une rivière, ici une plaine, et puis c’est tout. Mais comme elle ne vous dit pas comment est faite cette maison, comment sont les bords de cette rivière, etc., on n’a rien devant les yeux, tout est vague, il n’y a pas de cadre, il n’y a pas de décor. Tout ça est flou. Et Pouvillon sait si bien, d’un mot, d’une épithète, vous plaquer un paysage derrière les héros qui parlent ! Et puis, ce qui me crispe encore, c’est ce langage de fausse paysannerie, ce style lourd, gauche, en sabots et en bonnet de coton, sans pittoresque, sans élégance, sans légèreté. Qu’on fasse parler ainsi les paysans, je ne demande pas mieux, et encore on pourrait (et on a pu) trouver mieux ce qu’il y a d’original et de poétique dans le patois. — Mais que tout le récit soit écrit ainsi ! Ça non ! Ce n’est pas naïf comme elle voudrait, c’est bête. Ce n’est pas poétique, c’est gauche. Ce n’est pas curieux, c’est rasant.

Passons à Zola, n’est-ce pas ? En voilà un que j’ai méconnu ! et dont j’ai dit tant de mal sans le connaître, uniquement pour avoir parcouru trois

  1. Ah ! comme j’ai aimé « Valentine » il y a six mois, dans mon lit de malade à Alger ! Déc. 97.