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J’ai commencé par lui conseiller d’arracher Mounet-Sully aux Français, pour jouer avec lui. Le fait est qu’elle joue Ophélie et lui Hamlet, elle Doña Sol et lui Hernani, elle Chimène et lui le Cid, elle la plus grande actrice du monde et lui le plus grand acteur : ils sont faits l’un pour l’autre.

Ensuite je lui ai déroulé mon chapelet d’éloges, je lui ai dit les endroits de la Tosca où je l’admirais le plus, je l’ai suppliée de ne plus s’en aller vers ces rastaquouères marchands de cochons qui ne sont pas dignes de l’entendre, et j’ai signé :

P.-F. L…
élève de rhétorique, collégien à Paris.

Et en post-scriptum :

« Depuis que je vous ai vue je ne dors plus. »

Ce n’est pas la première fois d’ailleurs que j’écris à une actrice. L’année dernière, vers le mois de mai, j’étais allé voir Psyché, et j’avais trouvé Cerny très gentille dans le rôle de l’Amour. Je ne me faisais pas faute de le dire à l’école, et mes camarades se moquaient de moi.

Sarcey ayant débiné Cerny dans un article, j’écrivis en classe une lettre furibonde à cet imbécile, et je la mis à la poste.

« Écris aussi à Cerny, me dirent mes camarades. — Tiens, c’est une idée ! »

Et le soir, Glatron, Pelliquet, Dietz et plusieurs