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quelques instants avec elles, mais sans oser les inviter. Enfin, je prends un grand parti : je m’avance vers une Anglaise qui était venue avec ses deux sœurs passer huit jours chez M. François… et j’invite pour une polka. Elle accepte et nous partons. Cela n’a pas été trop mal ; mais déjà le piano s’arrête et une valse commence bientôt, pendant laquelle je m’appuie contre un buffet, gauche et ennuyé, enviant le bonheur de tous ces imbéciles à qui leurs parents ont appris à valser. Après la valse, le piano joue les premières mesures d’un quadrille et s’arrête. Je me décide à m’approcher de Jeanne B…, et avant que j’aie dit un mot : « Oui, oui », s’écrie-t-elle, et elle se jette à mon bras. « Et puis, vous savez, nous danserons une polka tout à l’heure. »

En effet, je danse une polka avec elle ; j’en danse une avec T…, un lanciers avec l’Anglaise n° 2, un quadrille avec l’Anglaise n° 3, mais pendant la polka avec Jeanne B…, que j’ai dansée tout à fait à la fin, elle me dit : « Dites donc, Alice Coutolleuc se froisse de ce que vous ne l’invitez pas. » Et moi qui n’osais pas ! Je me jette vers la chaise d’Alice et je retiens un lanciers, que je danse en effet avec elle.

Il est déjà très tard, deux heures et demie. On a valsé si souvent que le bal dure toujours. Pendant les valses je fais tapisserie, et c’est un métier bien rasant. Une fois, cependant, Mar-