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et qu’elle l’aimait trop sincèrement pour ne pas être heureuse avec lui de toutes les voluptés qu’il goûterait sur leur sein.

Aimery profita rarement de la permission qu’elle lui donnait. Ses velléités ne le conduisaient guère au delà du premier essai. La jeune Hindoue n’était pas ennemie de ces petites expériences qui se terminaient toujours si bien pour elle, et flattaient secrètement ses vanités intimes. Il lui était doux d’être aimée, il lui fut plus doux de se voir préférée. Ses charmes étaient désormais à l’épreuve des comparaisons, et quand Aimery revenait dans ses bras après une fugue interrompue, elle l’accueillait avec une petite mine ironique, indulgente et presque maternelle, comme si elle l’eût plaint, le pauvre enfant, d’avoir mal dormi en voyage.


La lettre à Psyché ne fut accomplie qu’après une demi-heure de peines. Il était 2 heures moins 10 quand son auteur entra enfin dans le boudoir de « Madame ».

Aracœli était assise toute nue dans le tiroir supérieur de sa commode Empire et semblait être la Léda du grand cygne de cuivre jaune qui s’éployait à la serrure. Le corps incliné, les jambes pendantes et les mains jointes en avant, elle faisait sauter une orange suspendue à une jarretelle pour exaspérer son singe Tarquin.

« Qu’est-ce que tu fais là ? »