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dévoiler au soleil, oh ! non ! non ! Quelque chose d’insurmontable l’empêchait de lui accorder cela. Et dès qu’elle eut reçu d’Aimery un sourire qui n’insistait plus, elle se mit à parler des bois et des fleurs et de la source bleue dont le bruit couvrait sa voix, et du printemps chaque jour plus tendre et de sa joie d’aimer avec toute la nature. On eût dit qu’elle cherchait bien vite à distraire Aimery par un autre enthousiasme pour chasser de son esprit l’idée malheureuse qui s’y était égarée.

Puis elle consentit à revoir la Tour ; et là, dans la chambre obscurcie, quand les rideaux fermés eurent enfin rassuré son goût pour le mystère, elle eut une sorte de soulagement à voir qu’Aimery ne la chérissait pas moins pour n’avoir pas obtenu d’elle ce qu’elle ne pouvait lui donner.

La robe grise fut vaincue sans lutte. Son inviolabilité s’évanouit avec le jour. Psyché ne résistait plus qu’à la lumière du ciel. Dans l’ombre elle était désarmée.

Reconnaissante d’avoir été obéie, elle se donna selon son cœur, avec un élan d’affection qu’elle n’avait pas encore manifesté si vif. Aimery la vit franchir un degré de plus vers l’émotion suprême des sens. Dans ses bras où elle restait auparavant silencieuse et comme recueillie sous la volupté, elle osa enfin rompre le silence, crier son amour, presque son plaisir.

Aimery l’écoutait dans un songe. Elle parlait,