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le char magique et vous n’avez rien à craindre.

— Vous m’avez dit : Presque ?

— Parce qu’il s’en faut de peu que vous n’ayez deviné.

— C’est une forêt enchantée ? Vous me faites frémir. Savez-vous que je ne suis pas loin encore de croire aux contes de fées ? Si l’on m’abandonnait ici, j’aurais peur des gnomes plus que des loups, et je verrais des lutins glisser dans tous les rayons de soleil.

— Au soleil couchant vous saurez tout, avant que les Korrigans n’aient quitté leurs tanières ; et mon secret n’a rien que vous puissiez redouter. »

Derrière les arbres, on apercevait depuis quelques minutes un grand mur à échelons qui montait régulièrement le long de la côte, comme posant les degrés d’un escalier géant. Au-dessus des chevrons atteints par la mousse, une végétation de parc se distinguait nettement de la forêt brune. Puis le mur s’interrompit. Deux bâtiments de communs flanquaient une large grille ouverte. La voiture y entra, suivit une aile droite, fit le tour d’un château paisible et avenant, passa la douve sur un pont de bois et s’arrêta enfin au milieu d’une terrasse qui dominait toute la contrée.

« C’est une oasis ! dit Psyché, ravie. Cela me rappelle… Oh ! combien cela me rappelle Philae ! »

— Philae ! s’écria Aimery. Vous aussi vous avez vu Philae ! »