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perdu, croisa le train. Il était tard. Le rapide filait en pleine campagne, sans autre bruit que le tambourin monotone et précipité battu par toutes les roues passant sur les rails, indéfiniment. Les fenêtres étaient closes, les rideaux étendus, et peu à peu toutes les odeurs flottantes s’étaient évanouies alentour, devant le parfum de Psyché.


Soudain le train s’arrêta sur ses freins stridents.

Elle se dressa en sursaut, et rouvrit les yeux.

« Qu’y a-t-il ?

— Rien. Une station.

— Où sommes-nous ?

— À Étampes sans doute.

— On crie Saint-Pierre… Saint-Pierre-des-Corps.

— C’est possible.

— Comment ? Nous avons passé les Aubrais ? Mais c’est avant Tours, Orléans !

— Je ne sais pas, » dit Aimery.

Elle tourna vers lui son visage transformé, ses yeux brillants, ses lèvres rouges, et elle éclata de rire.

Son rire n’était pas encore sans contrainte, mais Aimery ne pouvait se tromper ni au regard ni à l’attitude. Psyché entrait en métamorphose. La trace du baiser qui faisait luire sa bouche rayonnait sur toute sa personne.

« Oui, c’est cela, reprit-elle. Ne cherchons pas où nous sommes. C’est Nice ou Ploërmel, ou Baden-