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Ce n’est pas un cadeau ordinaire ; je ne le demanderais pas à un philosophe. Je te le demande à toi. Je sais bien que tu me le donneras. »

Elle joua un instant avec les plumes de paon de son éventail rond et tout à coup :

« Ah !… je ne veux pas non plus un peigne d’ivoire commun acheté chez un vendeur de la ville. Tu m’as dit que je pouvais choisir, n’est-ce pas ? Eh bien, je veux… je veux le peigne d’ivoire ciselé qui est dans les cheveux de la femme du grand-prêtre. Celui-là est beaucoup plus précieux encore que le miroir de Rhodopis. Il vient d’une reine d’Égypte qui a vécu il y a longtemps, longtemps, et dont le nom est si difficile que je ne peux pas le prononcer. Aussi l’ivoire est très vieux, et jaune comme s’il était doré. On y a ciselé une jeune fille qui passe dans un marais de lôtos plus grands qu’elle, où elle marche sur la pointe des pieds pour ne pas se mouiller… C’est vraiment un beau peigne… Je suis contente que tu me le donnes… J’ai aussi de petits griefs contre celle qui le possède. J’avais offert le mois dernier un voile bleu à l’Aphrodite ; je l’ai vu le lendemain sur la tête de cette femme. C’était un peu rapide et je lui en ai voulu. Son peigne me vengera de mon voile.

— Et comment l’aurai-je ? demanda Démétrios.

— Ah ! ce sera un peu plus difficile. C’est une