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regarda, sourit un peu et conclut : « Tu as raison. »

Ceci fut cause qu’il devint insupportable et que ses meilleurs amis se détachèrent de lui ; mais il affola tous les cœurs de femmes.

Quand il passait dans une salle du palais, les esclaves s’arrêtaient, les femmes de la cour ne parlaient plus, les étrangères l’écoutaient aussi, car le son de sa voix était un ravissement. Se retirait-il chez la reine, on venait l’importuner jusque-là sous des prétextes toujours nouveaux. Errait-il à travers les rues, les plis de sa tunique s’emplissaient de petits papyrus, où les passantes écrivaient leur nom avec des mots douloureux, mais qu’il froissait sans les lire, fatigué de tout cela. Lorsqu’au temple de l’Aphrodite on eut mis son œuvre en place, l’enceinte fut envahie à toute heure de la nuit par la foule des adoratrices qui venaient lire son nom dans la pierre et offrir à leur dieu vivant toutes les colombes et toutes les roses.


Bientôt sa maison fut encombrée de cadeaux, qu’il accepta d’abord par négligence, mais qu’il finit par refuser tous quand il comprit ce qu’on attendait de lui, et qu’on le traitait comme une prostituée. Ses esclaves elles-mêmes s’offrirent. Il les fit fouetter et les vendit au petit porneïon de Rhacotis. Alors ses esclaves mâles, séduits par