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En chemin, Séso raconta de nouveau le projet de banquet chez Bacchis.

« Ah ! chez Bacchis ! s’écria Mousarion. Tu te rappelles le dernier dîner, Tryphèra : tout ce qu’on a dit de Chrysis ?

— Il ne faut pas le répéter. Séso est son amie. »

Mousarion se mordit les lèvres ; mais déjà Séso s’inquiétait :

« Quoi ? qu’est-ce qu’on a dit ?

— Oh ! des méchancetés.

— On peut parler, déclara Séso. Nous ne la valons pas, à nous trois. Le jour où elle voudra quitter son quartier pour se montrer à Brouchion, je connais de nos amants qui ne nous reverront plus.

— Oh ! oh !

— Certainement. Je ferais des folies pour cette femme-là. Il n’y en a pas de plus belle ici, croyez-le. »


Les trois jeunes filles étaient arrivées devant le mur Céramique. D’un bout à l’autre de l’immense paroi blanche, des inscriptions se succédaient, écrites en noir. Quand un amant désirait se présenter à une courtisane, il lui suffisait d’écrire leurs deux noms avec le prix qu’il proposait ; si l’homme et l’argent étaient reconnus dignes, la femme restait debout, sous l’affiche, en attendant que l’amateur revînt.