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qui allaient saisir les phalènes… On croyait voir la couleur du vent dans les ondulations des fines graminées…

Les petites filles se baignaient dans un ruisseau limpide où l’on trouvait des coquillages rouges sous des touffes de lauriers en fleurs ; et il y avait des fleurs sur l’eau et des fleurs dans toute la prairie et de grands lys sur les montagnes et la ligne des montagnes était celle d’un jeune sein…

Chrysis ferma les yeux avec un faible sourire qui s’éteignit tout à coup. L’idée de la mort venait de la saisir. Et elle sentit qu’elle ne pourrait plus, jusqu’à la fin, cesser de penser.

« Ah ! se dit-elle, qu’ai-je fait ! Pourquoi ai-je rencontré cet homme ? Pourquoi m’a-t-il écoutée ? Pourquoi me suis-je laissée prendre, à mon tour ? Pourquoi faut-il que, même maintenant, je ne regrette rien !

« Ne pas aimer ou ne pas vivre : voilà quel choix Dieu m’a donné. Qu’ai-je donc fait pour être punie ? »


Et il lui revint à la mémoire des fragments de versets sacrés qu’elle avait entendu citer dans son enfance. Depuis sept ans, elle n’y pensait plus. Mais ils revenaient, l’un après l’autre, avec une précision implacable, s’appliquer à sa vie et lui prédire sa peine.

Elle murmura :