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Plus bas, la tunique en mousseline de pourpre ouvrait jusqu’à la hanche sa fente longue et lâche. Démétrios passa lentement la main par cette ouverture flottante et ses doigts en corbeille touchèrent de leurs extrémités les contours du sein gauche en moiteur. Le mamelon se dressa dans la paume.

Cependant, Touni ne s’éveilla point.

Son rêve s’altéra peu à peu, mais sans en être dissipé. Par ses lèvres entr’ouvertes, sa respiration devint plus rapide, et elle murmura une longue phrase qui n’était pas intelligible. Sa tête, brûlante, retomba.

Démétrios, avec la même douceur, retira sa main attiédie et l’épanouit aux souffles du vent.

La mer éternelle frémissait depuis la vague terrasse bleue jusqu’à l’immense scintillation de la nuit. Comme un autre sein d’une autre prêtresse, elle se gonflait vers les étoiles, soulevée par le rêve antique dont elle frissonne encore sous nos yeux attardés et dont les derniers êtres chercheront le mystère avant de s’effacer à la fin des âges. La lune penchait sur elle sa vaste coupe de sang. Au delà de l’air le plus pur qui eût jamais uni le ciel et la terre, une légère traîne rouge parsemée de veines sombres tremblait à fleur de mer sous la lune montante, comme le frisson d’une caresse à la pulpe d’un sein nocturne demeure après qu’elle a passé…