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en ceinture déroulait son ornementation bestiale, érotique et fabuleuse : on y voyait des centauresses montées par des étalons, des chèvres bouquinées par des satyres maigres, des vierges saillies par des taureaux monstres, des naïades couvertes par des cerfs, des bacchantes aimées par des tigres, des lionnes saisies par des griffons. La grande multitude des êtres se ruait ainsi, soulevée par l’irrésistible passion divine. Le mâle se tendait, la femelle s’ouvrait, et dans la fusion des sources créatrices s’éveillait le premier frémissement de la vie. La foule des couples obscurs s’écartait parfois au hasard autour d’une scène immortelle : Europe inclinée supportant le bel animal olympien ; Léda guidant le cygne robuste entre ses jeunes cuisses fléchies. Plus loin, l’insatiable Sirène épuisait Glaucos expirant ; le dieu Pan possédait debout une hamadryade échevelée ; la Sphinge levait sa croupe au niveau du cheval Pégase, — et, à l’extrémité de la frise, le sculpteur lui-même s’était figuré devant la déesse Aphrodite, modelant d’après elle, dans la cire molle, les replis d’un ctéis parfait, comme si tout son idéal de beauté, de joie et de vertu s’était réfugié dès longtemps dans cette fleur précieuse et fragile.