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— Où allait-il ?

— Je l’ai oublié. »

Puis elles reprirent, se dressant au milieu des eaux rapides :

« Reste avec nous, jeune fille, reste. Pourquoi songes-tu encore à celui qui n’est plus là ? Nous avons en trésor pour toi l’infini des joies présentes. Il n’y a pas de bonheur futur qui vaille la peine d’être poursuivi. »

Mais Byblis ne trouva point que la nymphe eût bien parlé. Quoiqu’elle ne sût pas exprimer les idées de sa petite âme, elle ne concevait pas d’autre joie que de souffrir en persévérant à la recherche du bonheur. Pendant la première journée de son inutile voyage, elle avait compté sur l’aide et sur le zèle des inconnus. Quand elle les vit, insouciants de favoriser sa destinée, elle ne compta plus que sur elle-même, et quittant le sentier tournant, elle pénétra au hasard dans le labyrinthe des bois.

Cependant les deux immortelles répétaient leurs sages paroles :

« Reste avec nous, jeune fille, reste. Pourquoi songes-tu encore à celui qui n’est plus là. Il n’y a pas de bonheur futur qui vaille la peine d’être poursuivi. »

Et longtemps, longtemps après, l’enfant qui gravissait la mystérieuse montagne, entendait dans le lointain, deux voix claires ensemble appelant :

« Byblis ! »