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Allegro


Ô mer ! mer triomphale et bouleversée !
Toi qui m’exaspérais au temps d’autrefois
Quand je me remplissais de ta grande voix,
    Ivre de pensée !

Aux rires infinis de tes flots marins
Quand j’écoutais, la nuit, tes cris d’épopée,
Ma robe au vent flottante et développée
    Tournant sur mes reins ;

Quand ta saveur salée agaçait ma lèvre,
Quand j’abaissais mes poings en claquant des dents,
Quand, la tête dressée et les bras pendants,
    Je tremblais de fièvre !

Mer ! toi qui fus ma muse et qui m’inspiras,
Souviens-toi des grands soirs où toutes mes vierges,
Les cheveux dénoués, chantaient sur tes berges,
    La cithare au bras !