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BAUDELAIRE


1er février 1915.

Tu m’as fait acheter les Fleurs du Mal. Je ne les avais pas ouvertes depuis plus de vingt ans.

Littérairement, j’admire C. B. plus qu’autrefois. Son vers de prose, son vers initial, est beau. Le vers amené par la rime est souvent au-dessous de tout ; nous chercherons tout à l’heure pourquoi. Mais les images sont fortes, neuves, pleines de sens.

Avec cela, je conserve toute mon antipathie pour l’auteur, et par conséquent pour son livre, puisqu’il se vautre dedans.

D’abord, l’odeur de Cuvette crasseuse et d’immonde hôtel garni, qui flotte sur ces vers, est insoutenable. Pot-Bouille me dégoûte moins. Pot-Bouille a quelque chose de rissolé qui fait figure de tableau. Mais Baudelaire sent la punaise pourrie.

Je n’aime ni sa religiosité, qui n’est pas une foi ; ni son enfer, qui n’est pas du satanisme ; ni son hypocrisie qu’il a l’insolence de nous attribuer ;