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de couleurs pâles, sortent peu à peu de tous ces petits doigts si pressés de s’unir à ceux d’un mari. Après cela, il faut couper, ourler, broder, que sais-je ? Les mois et les mois passent dans ce long travail d’enfant, qui porte sa récompense au terme de sa tâche.

Les accordailles se font toujours entre le jeune homme et la jeune fille, les parents n’étant consultés que par la suite. S’ils ne refusent pas leur consentement, les deux familles se réunissent et le prêtre a mission de rédiger le contrat, afin que la félicité matérielle des époux reçoive par là une sorte de bénédiction religieuse, comme leur bonheur intime et leur union chrétienne.

À la veille du mariage, toutes les amies de la fiancée se donnent rendez-vous dans sa chambre, et font elles-mêmes la toilette de noces. Le trousseau est déployé, exposé sur les murailles. La jeune fille est lavée par ses petites voisines, qui lui teignent les ongles en rouge.

C’est pour elle, en effet, que la fête se donne. C’est elle qui épouse et elle qui possède ; le mari ne vient qu’au second plan. Une très ancienne coutume qui remonte au delà des Grecs jusqu’aux premiers temps de la civilisation égéenne, veut qu’à Lesbos la femme soit chef de la famille, la fille seule héritière au détriment des fils. Elle hérite même du vivant de ses parents, car, en dehors de la dot qu’elle reçoit, et du trousseau