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culture, nous applaudissons, en effet, nous délirons si vous voulez. Un seul regret nous reste, c’est que Flaubert et Gautier, si dignes de rénover l’art chorégraphique, n’aient pas eu d’abord la chance d’inspirer une danseuse vraiment parisienne, et la plus éminente de toutes, mademoiselle ; c’est à vous que ce discours s’adresse.

La Danseuse. — Merci, après tout ce que vous venez de me dire, je vous tiens quitte de vos compliments.

Moi. — Vous les recevrez, malgré vous. Ne pensez pas que j’aurais tenu ici toute cette discussion sur la danse si je ne vous admirais pas à l’égal de vos ennemies.

La Danseuse. — Moi ? Vous m’admirez aussi ? Ah ! mon cher, vous devenez fade. Vous applaudissez tout le monde.

Moi. — Tout le monde ? Oh ! non. Vous et elles. C’est assez.

La Danseuse. — C’est trop. Et comment nous conciliez-vous ? Puisque ce sont mes ennemies, comme vous dites si bien.

Moi. — Vous ressemblez à M. Ingres.

La Danseuse. — Physiquement ? Ha ! Ha !

Moi. — Ne plaisantez pas. M. Ingres réalisait en 1840 une formule d’art qui était morte ailleurs et qui ne vivait plus que par lui seul. Vous me parliez tout à l’heure d’une toccata de Bach… Mais quoi de plus émouvant que la Stratonice ?