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demande : il y a une chance pour qu’on l’admette, quatre ou cinq pour qu’on la repousse, et dans ces derniers cas, c’est toujours Bagneux qui reste l’unique assistance.

Mais en province, dans une population qui comprend les onze douzièmes des Français, le soin d’assister les femmes en couches est presque partout laissé à l’initiative des voisines, qui s’en délivrent bien souvent quand elles peuvent donner pour prétexte que l’accouchée n’est pas mariée. Elle est malheureuse, mais c’est une gourgandine, puisqu’elle a un enfant, et les commères ajoutent : « C’est bien fait ! Elle n’avait qu’à se mieux conduire ! »

Se mieux conduire, vous l’entendez bien, c’est toujours vivre stérile.


On me répond : « Non. C’est se marier. » Vraiment ? Dites donc cela aux innombrables filles qui n’ont jamais trouvé de mari. Voilà qui paraît tout simple : se marier. Mariez-vous, c’est votre affaire. Mais les laides, les pauvres, les filles de condamnés, toutes celles dont personne ne demande la main, et qui trouveraient peut-être encore une heure d’amour, mais non pas une vie d’affection, pourquoi les condamnez-vous, vous l’État, à cette stérilité dont vous soufrez le premier. Pourquoi, le jour où elles conçoivent, ne les protégez-vous contre aucune avanie, aucun